L'espace visuel a 3 dimensions, dont 2 correspondent à l'image plane qui se forme sur la rétine, et la 3ème à l'effort de convergence et d'accomodation qui permet d'apprécier la distance. Dans la mesure où tous les points de la rétine ne jouent pas le même rôle, cet espace visuel n'est pas homogène. Dans la mesure où la distance (la coordonée z) est perçue par un processus différent des 2 autres, il n'est pas non plus isotrope.
Poincaré ne détaille pas les caractéristiques de l'espace tactile qui, dit-il, est plus compliqué et s'éloigne encore davantage de l'espace géométrique. Par contre il s'attarde sur l'espace moteur, notion plus inhabituelle, qui fait intervenir un espace à n dimensions :
En dehors des données de la vue et du toucher, il, il y a d'autres sensations qui contribuent autant et plus qu'elles à la génèse de la notion d'espace. Ce sont celles que tout le monde connait, qui accompagnent tous nos mouvements, et que l'on appelle ordinairement musculaires.On sait que cette notion a influencé les cubistes ( Gleizes et Metzinger l'évoquent dans Du cubisme ) ainsi qu'un certain Marcel Duchamp, dont le fameux Nu descendant un escalier ressemble d'ailleurs à une évocation directe de cet espace moteur de Poincaré.
Le cadre correspondant constitue ce que l'on peut appeler l'espace moteur.
Chaque muscle correspond à une sensation spéciale, susceptible d'augmenter ou de diminuer, de sorte que l'ensemble de nos sensations musculaires dépendra d'autant de variables que nous avons de muscles. A ce point de vue, l'espace moteur aurait autant de dimensions que nous avons de muscles. (1)
(1) ABU : Henri Poincaré - La Science et l'hypothèse
Anastasios Brenner : Géométrie et genèse de l’espace selon Poincaré