Depuis l'article de Turing sur les nombres calculables (1936), on sait qu'il existe deux types de problèmes : ceux qui sont algorithmiquement calculables, qu'une machine peut résoudre, et les autres. L'historien des sciences George Dyson pense que, si on sort du cadre strictement mathématique, il est utile d'en distinguer une troisième sorte, qu'on pourrait baptiser problèmes ambigus, qui sont calculables en théorie mais que nous sommes incapables en pratique de formuler dans un langage non-ambigu.
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13.4.12
27.4.11
159 - Hypothèse de l'Univers mathématique
Les interrogations quant au rapport entre structures mathématiques et structures physiques appartiennent à une longue tradition qui remonte à Pythagore et à Platon. Comment expliquer la déraisonnable efficacité des mathématiques dans les sciences de la nature, pour reprendre la formule d'Eugene Wigner ? La solution que propose Max Tegmark a le mérité d'une certaine simplicité : l'Univers et les mathématiques, c'est la même chose.
17.11.09
136 - « Non » augmentatif
L'un des traits les plus spécifiques et historiquement les plus marquants du mode de pensée occidental, c'est la permanence tenace et indestructible de l'opposition. C'est cette idée que Imre Toth développe dans un texte paru d'abord en 2006 dans la revue Diogène et réédité cette année (1).
Et c'est dans le domaine géométrique que le « non » augmentatif trouve son expression la plus fondamentale. En élevant au statut d'axiome la négation du 5ème postulat d'Euclide, la géométrie non-euclidienne amène brusquement à l'être (ou au moins à l'être-su) un autre Univers qui contient lui aussi tout ce qui est, qui n'est aucunement complémentaire du monde euclidien, mais au contraire logiquement incompatible avec lui. Le mathématicien se permet ainsi, par la puissance terrifiante de la négativité de créer un monde d'un trait de crayon...
(1) Liberté et vérité - Imre Toth - Editions de l'éclat 2009
(2) Palimpeste, propos avant un triangle - Imre Toth - PUF 2000
L'opposition n'a jamais pu être éliminée de l'histoire de l'Occident, la dissension n'a jamais pu être réduite au silence ; toujours, même dans les temps les plus durs, les plus terribles, des voix se sont élevées pour dire Non ! à l'injustice, Non ! à 'infamie. L'homme révolté est l'homme qui dit «non !» - c'est le Moi de la négativité. (1)La présence permanente de ce Non ! est ce qui sauve moralement l'Occident et ce qui lui permet d'aller de l'avant : si l'Inquisition ou le colonialisme sont des phénomènes spécifiquement occidentaux, le refus de l'Inquisition et l'anticolonialisme le sont tout autant. Cette idée majeure a été formulée dès 1842, par un certain Karl Marx :
Ohne Parteien keine Entwicklung, ohne Scheidung kein Fortschritt - «Sans partis, pas de développement, sans dissension pas de progrès.» Un bel aphorisme dont la vérité a été récemment confirmée par l'effondrement irréversible des dictatures monolithiques qui se réclamaient de son auteur. (1)Le « non » augmentatif, prérogative du sujet connaissant, possède le pouvoir exorbitant d'amener le non-être à l'existence simplement en le nommant. Et comme celui-ci n'a pas d'existence distincte de la connaissance qu'en a le sujet (en termes tothiens, il appartient à la modalité ontique être su), lui seul est connaissable avec une rigueur et une certitude absolue : madame Bovary, par exemple, est rigoureusement identique à la description qu'en fait Flaubert. Conséquence amusante : Il apparaît donc qu'il n'y a que deux savoirs exacts, le roman et la géométrie. (1)
Et c'est dans le domaine géométrique que le « non » augmentatif trouve son expression la plus fondamentale. En élevant au statut d'axiome la négation du 5ème postulat d'Euclide, la géométrie non-euclidienne amène brusquement à l'être (ou au moins à l'être-su) un autre Univers qui contient lui aussi tout ce qui est, qui n'est aucunement complémentaire du monde euclidien, mais au contraire logiquement incompatible avec lui. Le mathématicien se permet ainsi, par la puissance terrifiante de la négativité de créer un monde d'un trait de crayon...
En ce moment décisif, le sujet des mathématiques a pris conscience de sa liberté immanente, de sa liberté d'assigner la vérité à la fois à deux propositions axiomatiques contradictoires. La rupture avec l'axiome logique de la contradiction devint manifeste. Le mot «liberté» devint l'exergue de la création mathématique, répété haut et fort par les mathématiciens des générations suivantes. (1)Et cette liberté ne connaît dès lors aucune limite :
La géométrie non-euclidienne est vraie, aussi vraie que l’est simultanément son opposée, la géométrie euclidienne. Par conséquent, la vérité n’est pas la limite de la liberté mais au contraire, c’est la liberté qui est le commencement, la source d’où la vérité jaillit. (2)
(1) Liberté et vérité - Imre Toth - Editions de l'éclat 2009
(2) Palimpeste, propos avant un triangle - Imre Toth - PUF 2000
15.1.07
101 - No Free Lunch Theorem
L'optimisation numérique est un domaine des mathématiques appliquées qui s'occupe de trouver des solutions aux problèmes trop compliqués pour les maths. Officiellement on appelle ça des problèmes NP-complets (1) Ce genre de problèmes ne peuvent être résolus complètement un un temps « polynomial » : en gros, ça prend des siècles à calculer. On cite souvent le problème du voyageur de commerce (2) en exemple, mais il y en a partout.
Que faire face à un problème NP-complet ? On peut tester la totalité des résultats possibles : c'est la méthode de la force brute, qui peut prendre des siècles (ou des millénaires) de calcul... On peut aussi explorer ce gigantesque espace des résultats à l'aide d'un algorithme d'optimisation numérique. Il y en a pour tous les goûts, du recuit simulé à la cross-entropy en passant par la GRASP ( ben oui : la Greedy randomized adaptive search procedure ! )
Et le free lunch alors ? J'y viens. Un théorème démontré par David H. Wolpert et William G. Macready en 1995 prouve qu'aucun algorithme d'optimisation numérique n'est plus efficace qu'un autre en général. Celui qui sera le meilleur sur une classe particulière de problèmes sera le moins bon sur une autre, etc... Donc, pas de recette miracle. No free lunch ! D'où le nom du théorème. La vraie conclusion de tout ça, note Tom Roud, c'est que les numériciens et les spécialistes d'optimisation numérique ne seront jamais au chômage : chaque problème nécessite une étude approfondie et un algorithme spécifique pour être résolu. (3)
Là où l'histoire devient amusante, c'est que certains néocréationnistes ( encore eux ! ) ont prétendu se servir du théorème en question pour attaquer le mécanisme de l'évolution... (4) J'avoue ne pas avoir approfondi, mais le contresens semble flagrant : d'abord parce que la sélection naturelle a tout son temps ( 4 milliards d'années et quelques d'années ! ) et peut donc très bien se passer d'optimisation. Et puis parce que, comme l'explique Adam Ierymenko, personne ne prétend que la vie sur Terre soit parfaitement optimisée...
(2) Wikipedia : Problème_du_voyageur_de_commerce
(3) Tom Roud : Le "No Free Lunch Theorem"
(4) William A. Dembski : No Free Lunch: Why Specified Complexity Cannot Be Purchased without Intelligence
(5) GreyThumb.Blog ; Incompetent design and the no free lunch theorem
Que faire face à un problème NP-complet ? On peut tester la totalité des résultats possibles : c'est la méthode de la force brute, qui peut prendre des siècles (ou des millénaires) de calcul... On peut aussi explorer ce gigantesque espace des résultats à l'aide d'un algorithme d'optimisation numérique. Il y en a pour tous les goûts, du recuit simulé à la cross-entropy en passant par la GRASP ( ben oui : la Greedy randomized adaptive search procedure ! )
Et le free lunch alors ? J'y viens. Un théorème démontré par David H. Wolpert et William G. Macready en 1995 prouve qu'aucun algorithme d'optimisation numérique n'est plus efficace qu'un autre en général. Celui qui sera le meilleur sur une classe particulière de problèmes sera le moins bon sur une autre, etc... Donc, pas de recette miracle. No free lunch ! D'où le nom du théorème. La vraie conclusion de tout ça, note Tom Roud, c'est que les numériciens et les spécialistes d'optimisation numérique ne seront jamais au chômage : chaque problème nécessite une étude approfondie et un algorithme spécifique pour être résolu. (3)
Là où l'histoire devient amusante, c'est que certains néocréationnistes ( encore eux ! ) ont prétendu se servir du théorème en question pour attaquer le mécanisme de l'évolution... (4) J'avoue ne pas avoir approfondi, mais le contresens semble flagrant : d'abord parce que la sélection naturelle a tout son temps ( 4 milliards d'années et quelques d'années ! ) et peut donc très bien se passer d'optimisation. Et puis parce que, comme l'explique Adam Ierymenko, personne ne prétend que la vie sur Terre soit parfaitement optimisée...
Certaines choses ont évolué d'une façon qui nous semble inefficiente. Nous pouvons imaginer un meilleur design. En effet, nos cerveaux sont, tout comme le processus d'évolution, des algorithmes. Mais ce sont des algorithmes différents et pour cette raison, conformément au no free lunch theorem, il y a des problèmes que nos cerveaux vont résoudre mieux que ne l'a fait l'évolution... Et réciproquement. (5)(1) Wikipedia : Complexity classes P and NP
(2) Wikipedia : Problème_du_voyageur_de_commerce
(3) Tom Roud : Le "No Free Lunch Theorem"
(4) William A. Dembski : No Free Lunch: Why Specified Complexity Cannot Be Purchased without Intelligence
(5) GreyThumb.Blog ; Incompetent design and the no free lunch theorem
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