Si les « valeurs » traditionnelles ne sont pas respectées, nous allons nous retrouver sur une pente « glissante » ou « fatale ». (...) Si on aide à mourir les grands souffrants sans aucun espoir de guérir, on finira par faire mourir tous les plus vieux. (...) Si on commence par fumer des joints, on passera au crack puis au trafic, puis à brûler des voitures et attaquer la police pour le protéger. (1)Cet argument de la pente fatale est à la base d'un discours très présent dans l'espace public aujourd'hui et que le philosophe Ruwen Ogien nomme panique morale. La grande crainte qui sous-tend ce discours, c'est celle d'un effondrement de la société. Certaines institutions, comme la famille hétérosexuelle biparentale, sont vues comme des organes vitaux, dont la destruction porterait un coup fatal au corps social dans son ensemble. (1) Que des milliers de familles recomposées ou homoparentales se soient déjà formées sans que la la société ne s'effondre ne change d'ailleurs rien à cette angoisse...
Le discours de la panique morale pose les problèmes en termes de valeurs plutôt qu'en termes de droits ou d'intérêts, et ce glissement de vocabulaire n'est évidemment pas neutre :
Aux Etats-Unis, George W. Bush et le camp républicain ont exploité en permanence la valeur « famille » pour nier aux personnes de même sexe le droit de se marier et d'élever des enfants, la valeur « vie » pour contester le droit davorter, la valeur « sécurité » pour brider le droit à informer des journalistes et les droits de la défense (...). (1)La question que pose Ruwen Ogien, c'est : pourquoi le discours sur les valeurs, thème traditionnel de la droite, déborde-t-il à ce point aujourd'hui sur le discours de la gauche ? L'idée que l'électorat « populaire » serait plus sensible à des « valeurs morales » qu'à ses droits, ses libertés et ses intérêts matériels, est-elle une idée juste ?
(1) Le Monde 2 du 3-03-07: entretien avec Ruwen Ogien
Editions Grasset : La panique morale
Sciences humaines : Halte à la panique morale !
5 commentaires:
Est-ce que ce serait lié au retour à la religion? Ensuite, on peut se demander à quoi serait lié le retour à la religion. Au fait que face à l'occident, une opposition se dresse, qui déclare s'appuyer sur une religion? En réaction de quoi l'occident se sentirait obligé de se barder de vertus morales, en miroir si j'ose dire, pour se poser sur le même terrain? Bon, je me pose des questions.
Effectivement, de nombreux arguments conservateurs sont fondés sur un argument de type panique morale. C'est un argument qui ne peut jamais être vérifié. Dans le même genre d'idées, on m'a récemment expliquée qu'il ne fallait pas permettre l'adoption homosexuelle par principe de précaution : Tant que l'on aura pas montré que les homosexuels sont capables d'éduquer des enfants, on n'autorisera pas l'adoption. La force de ces arguments et leur faiblesse, provient qu'ils ne seront jamais vérifiables.
L'argument du "principe de précaution" est assez marrant... Quoique avec l'arrivée à l'âge adulte d'enfants élevés par des couples homosexuels, ça devient moins convaincant. D'autant plus qu'il semble bien que les premières études montrent que les dits enfants s'en sortent plutôt pas mal !
Il n'est pas facile dans ce débat de faire la part des vieilles lunes (que nous ont servies les conservateurs de tous poils et de tous pays dans leur écrits depuis le début des temps historiques et que débitaient sans doute les vieillard au coin du feu des temps jadis) et des risques nouveaux dûs à une société qui bouge très vite... Si je n'avais pas peur de montrer mon âge, je dirais TROP vite.
"...est-elle juste?"
Je crois que oui, puisque ça marche dans beaucoup de cas. Pour prévenir cela on virera donc dans le problème de changement de mentalité je pense.
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