31.3.05

034 - Mort cérébrale

Alors oui, justement : la mort cérébrale est bien un concept, au sens de catégorie mentale fabriquée. C'est même un concept juridique forgé dans les années 60 aux Etats-Unis par une commission ad'hoc, qui a décidé qu'on pourrait désormais déclarer "morte" une personne répondant à une liste plus ou moins arbitraire de signes cliniques. Passionant article dans le New-Yorker où l'on se rend compte que le frontière entre vie et mort est bien ténue et pas forcément très nette :

The New Yorker: AS GOOD AS DEAD

30.3.05

033 - Simulation Argument

L'idée du simulation argument proposé par Nick Bostrom, professeur de philosophie à Oxford peut se résumer ainsi :

  • Nous aurons bientôt la puissance de calcul nécessaire pour faire tourner des simulateurs d'univers, comme dans Matrix ou plutôt dans Simulacron 3.
  • Si de tels simulateurs existent, alors le nombre d'humains simulés devriendra vite très supérieur au nombre d'humains réels.
  • Donc, à moins que l'espèce humaine soit proche de l'extinction, il est très probable que nous vivions actuellement dans une simulation informatique. CQFD !

  • Are You Living in a Computer Simulation?

    29.3.05

    032 - Théorie des coûts endogènes

    Inventée par l'économiste John Sutton, la théorie des coûts endogènes explique comment,
    ...quand la technique permet de réduire les coûts de fabrication, la concurrence entre les opérateurs les plus puissants tend à annuler le bénéfice de la technique nouvelle en renchérissant artificiellement le droit d'entrée.
    Exemple : aujourd'hui, selon les majors du disque (ou du cinéma), les coûts sont tels qu'il est impossible de sortir un disque (ou un film) à moins de X millions d'euros. Mais cette situation, ce sont les majors elles-mêmes qui la créent : si mon voisin dépense X millions pour promouvoir ses salades, alors je ne peux plus vendre les miennes sans dépenser au moins autant !

    Le Monde.fr : Musique piratée ou musique libérée ?

    25.3.05

    031 - Informatique de gauche

    Y a-t-il (ou y a-t-il eu) une informatique de gauche ? Bien sûr que oui ! Je passe la parole à Pascal Robert, maître de conférences à l’Université d’Aix-Marseille, même si son article vise plutôt à dépasser cette posture un poil simpliste...
    La critique de l’informatisation s’est également construite sur une dichotomie qui se cristallise déjà dans les années 70. Il y aurait ainsi une « bonne » informatique opposée à une « mauvaise » informatique. (...) On valorisait alors une informatique décentralisée contre une informatique centralisée. Et l’on repeignait aux couleurs des positions partisanes cette distinction, avec un J. Attali par exemple qui louait une informatique de gauche, susceptible de porter une autre manière de faire de l’informatique comme on supposait possible une autre manière de faire de la politique.
    Entre critique et modélisation,pour une « nouvelle posture critique » face à l’informatisation

    24.3.05

    030 - Media ecology

    La media ecology, c'est l'étude des médias considérés comme formant un environnement. Les media ecologists s'intéressent donc - dans la plus pure tradition Mac-Luhanesque - à la façon dont les moyens techniques de transport et de stockage de l'information affectent les communautés humaines qui les emploient.

    What is Media Ecology?

    La médiologie de Régis Debray, c'est pareil, mais en français, et avec beaucoup plus de mots compliqués...

    Le site de la médiologie

    23.3.05

    029 - Tombologie

    Théorisée par le Pr. Shadoko, la tombologie se pose comme une séduisante alternative à la gravitation newtonienne classique :
    Les choses tombent à cause qu'elles recèlent en elles une humeur maligne,une propension intime, intrinsèque et première, en un mot un principe tombant et qui les fait tomber : la Tombomanie. Or ne croyez pas que cette tombomanie soit l'effet d'une soit disant loi universelle; non, c'est le fruit de la coupable industrie d'un microbe ou virus appelé Le Tombovirus, vous l'aurez deviné.
    Hommage à Jacques Rouxel (l'inventeur des Shadocks), visible le 9 avril au festival d'animation d'Auch :
    Festival national du film d'animation d'Auch

    22.3.05

    028 - Sphexicité

    Néologisme de Douglas Hofstadter qui figure dans Gödel, Escher Bach ( en V.O : sphexishness. ) Il désigne - d'après le nom de la guêpe sphex - la capacité que partagent certains organismes simples avec les programmes informatiques : celle de répéter sans cesse le même comportement, sans aucune variante ni adaptation, même en cas d'échec manifeste.

    Nationmaster Encyclopedia: Sphex

    Voir aussi :
    dvanw: 012 - Membot
    et une application du concept de sphexicité (mélangé à pas mal d'autres) à la fiction hypertextuelle :
    Halting, Sphexishness, and Analysis Terminable and Interminable: some thoughts on hypertext narrative

    21.3.05

    027 - Algorisme

    Je ne vous refais pas l'histoire de algorithme et de son origine arabe (Al-Khwarizmi)... Mais l'algorisme, c'est quoi ? Au moyen âge, ça désigne la pratique des opérations arithmétiques écrites ( cf. Une histoire du calcul artificiel )

    Aujourd'hui c'est une école artistique qui revendique une production artistique à base d'algorithmes. Mais attention ! L'ordinateur n'est pas le seul moyen d'employer un algorithme, puisque la sérigraphie, la gravure ou même la règle et le compas sont également des moyens algorithmiques. Voici d'ailleurs la définition officielle ( et algorithmique ) de l'artiste algoriste :

    if (creation && object of art && algorithm && one's own algorithm) {
    include * an Algorist *
    } elseif (!creation || !object of art || !algorithm || !one's own algorithm) {
    exclude * not an Algorist *
    }

    The Algorists, historical notes

    18.3.05

    026 - Folk Theory

    Les folk theories, ou "théories populaires" sont devenues un champ d'études pour les sciences cognitives. Il s'agit de décrire et d'essayer de formaliser les théories plus ou moins conscientes que vous et moi fabriquons pour expliquer le monde. Il y en a un peu pour tous les goûts : Folk ontology, folk physics, folk psychology, folk biology, folk mathematics, folk economics, vous avez le choix !

    Voir aussi 019 - Folksonomy

    ERP - European Review of Philosophy 8: Folk Theories

    17.3.05

    025 - Radio-identification

    La radio-identification (radio-frequency identification ou RFId en VO, c'est le sans-fil appliqué au code-barre. Il s'agit de coller à chaque objet une puce capable d'échanger des infos par ondes radio avec un lecteur ad-hoc. Qui n' a jamais rêvé de taper dans Google : Où sont mes putains de chaussettes rouges ? Maintenant c'est possible.

    La question, c'est comment empêcher les autres de googler aussi vos chaussettes rouges, et - accessoirement - vous à l'intérieur des chaussettes ?

    Le Monde.fr : L'étiquette radio séduit tout autant qu'elle inquiète

    16.3.05

    024 - Hystériser

    Hystériser, c'est faire passer par le corps ce qu'on ne parvient pas à exprimer autrement. En principe, c'est plutôt sexuel : hystériser, c'est mettre du désir, de la libido là où, au premier abord, il n'y a pas lieu d'en mettre (J.D. Nasio). Prenez la toux, par exemple...

    Extrait de la chronique Francis Marmande dans le Monde daté du 17 mars, et pas ( pas encore ? ) disponible en ligne :

    Au théâtre, (...) tels les guetteurs du désert, les tousseurs se dévouent. Ils toussent pour nous. Le corps hystérise son ennui, ses défenses, son empêchement. Une des expériences les plus fortes de la vie, c'est de ne pas comprendre. L'incompréhension fait peur. Elle renvoie au silence et au vide. La toux comble. Là, les choses commencent.

    14.3.05

    023 - Culture téléphonique

    Eh oui ! Non seulement il y a une culture téléphonique, mais en plus il y en a plusieurs ! Et celle des Américains diffère assez nettement de celle des Européens. En très gros, ils ont moins de portables, utilisent plus de téléphone fixe et moins de SMS, parlent plus longtemps et donnent moins facilement leur numéro de portable...

    Pourquoi de telles différences ? Psychologie, atavisme culturel, génétique ? Eh ben non : politique tarifaire !

    Reuters : Europe, U.S. Separated by Telephone Cultures

    11.3.05

    022 - OLNI

    Acronyme pour "Objet Littéraire Non Identifié". Rencontré sur La république des livres, le blog de Pierre Assouline, qui l'emploie à propos d'un livre de Jean-Pierre "pots de fleurs" Raynaud, l'immortel auteur du pot doré devant le centre Beaubourg.

    Un livre donc, intitulé Projet Drapeau Base sous-Marine et qui raconte un projet refusé : pas le moindre accessoire de jardinage cette fois, il s'agissait simplement de raccrocher une paire de drapeaux nazis sur une ancienne base de sous-marins à Bordeaux... Ca sent le OANI !

    La république des livres: Raynaud au coeur du mental

    10.3.05

    021 - Capitalisme cognitif

    L'idée est que le capitalisme analysé par Marx est en train d'être remplacé par un autre stade : la production de biens devenant de plus en plus immatérielle, les capitalistes d'aujourd'hui ne possèdent plus d'usines mais des "vecteurs de communication", c'est à dire des moyens de produire, transformer et stocker l'information, les moyens de transformer sa valeur d'usage en valeur ajoutée. Ces nouveaux capitalistes sont donc des vectoralistes, et l'ancienne classe ouvrière est remplacée par un prolétariat de l'information : le cognitariat.

    The Communism of Capital, or, the cooperative nature of cognitive capitalism

    Voir aussi A Hacker Manifesto

    9.3.05

    020 - Modelessness

    Le fait d'être sans mode, pour un programme informatique, signifie que chaque commande se comporte toujours de la même façon et est disponible à tout moment. Ca semble évident ? Ca ne l'était pas : les anciens traitements de texte avaient un mode "edit" où les commandes étaient différentes du mode "normal".

    Macintosh Human Interface Guidelines : Modelessness

    "No modes" a été l'une des idées centrales de Jef Raskin, l'un des pères du Macintosh, qui est mort le 26 février. Une idée qu'il avait fait inscrire sur sa plaque d'immatriculation (!) et qui était au coeur de son projet de The Humane Interface, pour l'amélioration des interfaces entre humains et artefacts. Si on pousse l'idée à son terme, ça suppose aussi d'en finir avec le principe d'applications séparées autour d'un système d'exploitation.

    The Jef Raskin Center for Humane Interfaces

    8.3.05

    019 - Folksonomy

    Qu'est-ce que peut bien désigner un mot composé des racines "folk" et "taxonomy" ? Qu'est-ce au juste que la taxinomie populaire ? Le mot, inventé par un M. Thomas Vander Val s'applique en particulier au social bookmarking, le fait d'utiliser des tags pour "classer" des contenus ( et pour les "signaler" aux autres ), comme ce que permet flickr.com pour la photo. Mais il a un sens plus général...

    Cf. Wikipedia, the free encyclopedia pour la version courte et Explaining and Showing Broad and Narrow Folksonomies pour la longue.

    7.3.05

    018 - Sérendipité

    Mot inventé en 1754 par le philosophe Horace Walpole, pour désigner le don de faire des découvertes utiles par accident. Le mot vient d'un conte de fées que Walpole aurait lu enfant, intituléThe Three Princes of Serendip. Serendip étant un mot arabe désignant le Sri-Lanka... Et les 3 princes en question auraient eu le don de tomber par hasard sur des choses merveilleuses !

    BBC - Radio 4 - The Serendipity of Science

    Le projet SERENDIP est une opération liée au programme SETI. SERENDIP signifie ici : Search for Extraterrestrial Radio Emissions from Nearby Developed Intelligent Populations. Il s'agit d'écouter au hasard les ondes radio en comptant sur la sérendipité pour dénicher par hasard une station extra-terrestre...

    The SERENDIP Project

    Update ! Incontournable, le texte de M. Pek van Andel, le monsieur Sérendipité hollandais :
    Automates Intelligents : Sérendipité, ou de l'art de faire des trouvailles

    4.3.05

    017 - Gestualité

    La gestualité c'est la gestuelle considérée d'un point de vue sémiotique : c'est à dire comme l'un des modes de production du discours. Gestualité et oralité sont ainsi considérées comme les deux modes principaux de production du discours parlé.

    Voir "De l’iconicité de l’image à l’iconicité des gestes" pour une analyse peircienne assez ardue de ladite gestualité.

    3.3.05

    016 - Culture animale

    13 ans après Chimpanzee Material Culture (Cambridge University Press, 1992), William McGrew publie The Cultured Chimpanzee: Reflections on Cultural Primatology. Sa thèse est l'existence de comportements culturels chez l'animal en général, et chez le primate en particulier.

    L'exemple classique (de 1992) est celui d'un groupe de chimpanzées capable d'utiliser des pierres pour ouvrir des noyaux de fruits, alors que leurs semblables d'autres groupes en sont incapables : comportement acquis et conservé au sein d'un groupe social, donc comportement culturel.

    The Cultured Chimpanzee: Reflections on Cultural Primatology

    2.3.05

    015 - Science by people

    From Ivan Illich, Œuvres complètes, Volume 2, Fayard, p. 175 :
    (…) l’expression « science by people » est employée par opposition à « science for people » (la science pour l’homme). La dernière expression désigne ce que l’on appelle « recherche et développement », et plus simplement, depuis la Seconde Guerre mondiale, « R & D ». (…) La R & D peut être menée sur la bombe à neutrons, la dystrophie musculaire, les photopiles solaires ou les viviers – toujours au bénéfice d’autres hommes. Manifestement la science par l’homme n’est pas cela. (…) Elle désigne la recherche menée avec très peu de financement ou pas du tout, sans parrainage, sans communications publiées dans de prestigieuses revues, et débouchant sur des résultats sans intérêt marchand. (Ceux qui s’y livrent) travaillent seuls ou en équipes très réduites, visant au premier chef, par leur étude, à façonner directement leur mode de vie. (…) En contraste avec la science qui œuvre dans l’intérêt du marché et de l’industrie, c’est la recherche conviviale. »
    Cité par autres espaces

    1.3.05

    014 - Cool Hunting

    Exxxcellente émission de PBS pour tout savoir sur l'art du "cool hunting". En gros, le cool, ça marche comme ça :
    « Au sommet du triangle, il y a l'innovateur : environ 2 à 3 % de la population. En desssous de lui, il y a le trendsetter, environ 17 %. Il récupère les idées de l'innovateur et se les approprie. Encore au dessous, il y a le early adopter - le pourcentage exact est incertain - et juste en dessous, il y a le grand public, qui représente 80 %.

    Le early adopter copie ce que fait le trendsetter et l'adapte à la consommation de masse. Il le prend et le déforme jusqu'à le rendre plus acceptable. Et c'est alors que le consommateur de base l'adopte, ce qui le tue immédiatement. »
    frontline: merchants of cool: interviews: dee dee gordon and sharon lee | PBS