1.3.07

107 - Pataphore

La pataphore est une « surmétaphore », une extension de la métaphore, de la même façon qu'on peut considérer la pataphysique comme une extension de la métaphysique en ce qu'elle s'étend aussi loin au-delà de la métaphysique que la métaphysique au-delà de la physique.

La première description du concept serait parue dans Closet 'Pataphysics (La Nouvelle-Orléans, 1990) sous la plume d'un certain Paul Lopez, pseudonyme d'un écrivain-chanteur du nom de Paul Avion (non, ça n'est pas une pataphore !). Si le concept semble plutôt intéressant, l'exemple de pataphore donné par Wikipedia me pose problème :
« La lune s'est levée au-dessus de la mer où les pirates ont navigué. La lune était un bol de lait, bu par un chat, le chat d'Axelle. »
1. La lune (et les pirates et la mer) existent en réalité.
2. Le bol de lait existe dans la métaphore.
3. Le chat (et Axelle, et le monde où ils vivent) existe dans la pataphore. (1)
Sauf que le chat et Axelle - à mon avis - ne rajoutent aucun degré : ils vivent dans le même monde que le bol de lait, donc dans celui de la métaphore. La lune était un bol de lait, bu par un chat à l'œil de braise, par exemple, me conviendrait mieux. La braise n'existe que dans un 3ème monde : ni celui de la lune, ni celui du chat. Le site officiel de la pataphorologie donne quelques autres exemples trop longs pour figurer ici, et propose une extension de la pataphore au domaine scientifique :
On peut dire de la théorie des cordes que c'est une sorte de pataphore mathématique, en ce qu'elle est une supposition basée sur une supposition. En d'autres termes, dans la mesure où la théorie des cordes est une spéculation basée sur des idées qui sont elles-mêmes spéculatives (en l'occurence : la théorie de la relativité générale et la mécanique quantique), la théorie des cordes n'appartient pas à la physique mais à la 'pataphysique. (2)
Sauf que là aussi, c'est assez discutable : d'abord relativité générale et mécanique quantique ne sont plus des idées spéculatives depuis longtemps... Et puis le rapport de la physique au réel fonctionne-t-il sur le mode de la métaphore ? Ca, pour le coup, c'est une idée spéculative !

(1) Wikipedia : pataphore
(2) paulavion.com : pataphorology

7 commentaires:

dvanw a dit…

Je profite qu'on me donne la parole pour noter, qu'avec un peu de recul, ma critique de l'exemple de Wikipedia me semble très discutable : après tout, la définition officielle ne parle aucunement d'empiler des niveaux de réel, ni de métaphore dans la métaphore. C'est plus simple et plus ouvert que ça : il s'agit d'étendre la métaphore au delà du stade où elle fonctionne comme métaphore. Le chat est pataphorique, parce que lui, contrairement à la lune, ne fonctionne pas métaphoriquement.

Pardon O grand Wiki, d'avoir douté de ta sagesse... L'inconvénient du blog, c'est qu'on peut y écrire avant de réfléchir !

Matthieu a dit…

par contre, tous les developpements de la theorie des cordes sont clairement pataphoriques

dvanw a dit…

Matthieu, si tu as des lumières sur la question, je suis intéressé... Un ptit billet, peut-être ?

Anonyme a dit…

J'adore tous les patakekchoses.

Ce qui me fait penser au film Le Facteur... Pablo Neruda parle de métaphore au facteur... Qu’est-ce que la métaphore ? demande le facteur. La métaphore consiste à décrire quelque chose par la caractéristique d’une autre chose. Le ciel pleure... C’est l’être humain qui pleure, remarque le facteur. Mais si c’est le ciel qu’on fait pleurer, que comprends-tu des pleurs du ciel ? Qu’il pleut, répondit le facteur. C'est ça, une métaphore. (Et si je dis "Il pleut des cordes", c'est pataphysique?) Le facteur demanda alors : est-ce que l’on peut supposer que ce monde où nous vivons, avec sa terre, son ciel, ses mers, ses fleuves et ses mots, est une métaphore de quelque chose d’autre ? Du monde?

Et là on tombe sur la métaphore qui se réfléchit dans la métaphore, l'image qui s'autoporte? Une sorte de mise en abyme comme disent les littéreux.

Pour les corde Matthieu a raison, c'est megaphorique, teraphorique, voire petaphorique cette théorie.

dvanw a dit…

ARgh ! Je dis « mise en abyme » moi même chaque fois que je trouve le moyen de le caser dans la conversation... Je dois donc être un littéreux !

Et si en plus je vis dans un monde qui est la métaphore de quèquechose d'autre... Le vertige existentiel va me jeter dans l'abyme d'un moment à l'autre !

Anonyme a dit…

C'est vrai que cela donne un vertige abyssal... En plus je viens de voir sur le blog de naarjuk qu'abyme s'écrirait abîme. Ce qui me rappelle ce vieux truc mnémotecnique : le ^ de cime est tombé dans l'abime.

dvanw a dit…

ABYME ou ABYSME n. f.
Seulement dans la locution En abyme, en abysme. - LITTÉRATURE. BX-ARTS. Mise en abyme, construction en abyme ou (rare) en abîme, procédé par lequel on intègre dans un récit, dans un tableau, un élément signifiant de ce récit ou de ce tableau, qui entretient avec l'ensemble de l'œuvre une relation de similitude.

Dixit le dictionnaire de l'académie. Quant au billet de Naarjuk, est-ce que l'abîme qu'il évoque ne serait pas juste un gros trou ?